BANGKOK INONDE -70

Actuellement inondations exceptionnelles dans le Sud Thaïlande
Il y à quelques mois des inondations d’une ampleur exceptionnelle
 on dévastées une grande partie du pays.

Ces infos font régulièrement / la une des média / avec un certain étonnement.
Comme revient régulièrement la disparition de Bangkok sous les eaux.

L’être humain à une grande capacité à oublier les 
mauvais souvenirs.

La preuve ?
Il y à presque 70 ans, 
  La cité des anges rivalisait avec la cité des Doges

2011 Bangkok est toujours là.
Les paysans on reprit leur travail
Les touristes….



ET UN PEU D'HISTOIRE:
 

par Jean Baffie, CNRS-Université de Provence, directeur de la Maison Asie-Pacifique, Marseille
Bangkok inondée, une constante dans l'histoire


Il ne manque pas de savants esprits pour expliquer que les inondations de Bangkok ne sont dues qu'au réchauffement climatique ou aux initiatives malheureuses d'anciens dirigeants qui ont voulu moderniser la capitale thaïlandaise en comblant des canaux pour y faire passer des rues. Des éléments d'information consultables dans quelques ouvrages classiques, essentiellement en langue thaïe, nous montrent toutefois que les inondations à Bangkok ont loin d'avoir un caractère exceptionnel.

Un ouvrage français publié il y a 140 ans parle de Bangkok comme d'une ville"semi-aquatique, dont la grand rue est un fleuve" (O. Sachot, Pays d'ExtrêmeOrient, Paris, 1871, p. 73). Bangkok est de fait à moins de 40 km à vol d'oiseau du golfe de Thaïlande et est située à 0,5-1,5 mètre au-dessus du niveau de la mer et a longtemps connu une importance subsidence. Mais la ville en a connu plus d'une douzaine d'importantes inondations depuis qu'elle est devenue capitale du royaume à la fin du XVIIIe siècle.

Depuis que Bangkok est devenue la capitale du Siam en 1782, les inondations majeures ont de fait été relativement fréquentes. En 1785, la construction du palais royal était à peine achevée, lorsqu'en décembre la capitale connut ses premières graves inondations. L'esplanade royale fut sous 4,2 m d'eau et le palaisChakkrawat Phiman, résidence du roi, sous plus de 2 mètres. Une large partie de la plaine centrale fut touchée et le prix du riz devint exorbitant. Tellement que le roi décida de puiser dans ses entrepôts pour en vendre à la population à un prix abordable.

Sous le roi suivant, en 1819, le 28 octobre, l'eau dépassa les 3 mètres sur l'esplanade royale et atteint les 2 mètres au niveau du palais royal. Comme la fois précédente le cours du riz grimpa rapidement et la population dut restreindre sa consommation.

Sous le troisième roi de la dynastie de Bangkok, le 4 novembre 1831, l'eau atteint la côte des 2,5 mètres sur l'esplanade royale. Tout le pays fut dévasté et 60 % de la récolte de riz fut perdue.

Sous le règne suivant du fameux roi Mongkut (1851-1868), le Siam connut deux inondations : le 25 novembre 1859, ce ne fut pas trop grave puisqu'il n'y eut que 20 cm d'eau au niveau du palais, mais les annales ont noté que les vergers autour de Bangkok furent gravement touchés ; mais en novembre 1867, de nouvelles inondations touchèrent la capitale.

Sous le règne particulièrement long du roi Chulalongkorn (1868-1910), deux nouvelles inondations eurent lieu, en novembre 1879 et en décembre 1897. Bangkok ne fut pas la région la plus touchée : dans certains districts de la province méridionale de Trang, après 20 jours et 20 nuits de fortes pluies, on mesura jusqu'à 6 m d'eau ce qui entraîna la mort de nombreux habitants.

En octobre-novembre 1917, sous le règne suivant, les inondations touchèrent l'ensemble de Bangkok ; pendant un mois complet la population dut se déplacerdans les rues en barque ; les vergers et potagers des environs de Bangkok furent dévastés ; une décennie fut nécessaire pour qu'ils retrouvent leur état du début de l'année 1917.

Vingt-cinq ans plus tard, de la fin du mois de septembre au 30 novembre 1942, Bangkok connut les plus graves inondations de son histoire. La totalité de la ville fut sous les eaux, restant seuls émergés les ponts les plus élevés. Certaines rues furent sous plus de 2 m d'eaux pendant 46 jours. L'université Chulalongkorn était transformée en vaste lac. Toutes les rues s'étaient transformées en canaux sur lesquels circulaient des barques et des canots à moteur.

Pour ces dernières décennies, Bangkok connut de sérieuses inondations en 1974, 1980, 1983 et 1995. En 1980, le quartier de l'université Ramkhamhaeng, au nord-est, fut sous les eaux pendant de nombreuses semaines, la marine avait toutefois construit des pontons et passerelles et un système de bateaux taxis desservait les diverses facultés transformées en îles. En 1983, même la station balnéaire de Pattaya fut inondée. Ce sont donc les quatorzièmes inondations importantes que connaît Bangkok en 229 ans en comptant celles de cette année.

Cela fait en moyenne, une fois tous les 16 ans, et depuis 1995 16 années se sont effectivement écoulées. Doit-on absolument tenter de trouver des causes exceptionnelles ? Le réchauffement climatique entraîne – dit-on – des pluies de Moussons plus abondantes. Certes, mais la Thaïlande a sans doute connu ces dernières années davantage de périodes de sécheresse que d'inondation.

Les anciens canaux comblés pour faire place à des rues de la capitale auraient-ils pu éviter ces inondations ? En fait, moins de vingt canaux dans le centre de Bangkok furent transformés en rues. Or il reste officiellement aujourd'hui 1395 canaux sur le territoire contrôlé par le gouvernorat de Bangkok. La subsidence de Bangkok est un phénomène très sérieux. A partir des années 1970, les villages de lotissement avant d'être raccordés au réseau de distribution de l'eau courante (ce qui est actuellement le cas de 91 % des Bangkokiens) et certaines industries comme la brasserie pompaient l'eau du sous-sol de la capitale. En 1981, la subsidence annuelle était à Bangkok en moyenne de 4 cm. Vers 1999, c'était ainsi 2 millions de m3 d'eau qui étaient pompé annuellement entraînant un affaissement du sol pouvant aller jusqu'à 12 cm par an. Encore dans les années 1990, quand je devais faire un trou dans mon jardin – situé dans le quartier du marché de Chatuchak – je trouvais généralement l'eau à moins de 50 cm. Depuis, la situation s'est heureusement stabilisée après des mesures énergiques prises par les gouvernements.

Si les inondations sévères furent relativement fréquentes à Bangkok, leurs conséquences étaient bien entendu très différentes lorsque la majorité de la population habitait des maisons flottantes ou des maisons sur pilotis et que le pays était peu urbanisés et quasiment sans industrie. En 1942 ceux qui habitaient des"compartiments chinois" d'un seul niveau souffrirent infiniment plus que les familles des villages urbains situés le long des canaux, comme celui de Ban Khrua que j'ai beaucoup étudié, qui disposaient toutes d'embarcations. Si les inondations de 2011 resteront certainement parmi les plus dramatiques de ces deux derniers siècles, avec plus de 500 morts pour l'ensemble du pays, il est donc important de relativiseret l'étude de l'histoire de Bangkok nous aide à prendre le recul nécessaire.

Source:http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/12/07/bangkok-inondee-une-constante-dans-l-histoire_1614028_3232.html